Aux Sources de Medjugorje — Avec Notre Dame vers la culture de la paix
Daria Klanac, Aux Sources de Medjugorje, Éditions Sciences et Culture, Montréal, 2014, 3e éd. (1re éd. 1998, ISBN 2-89092-240-5), chapitre ix, pages 193 à 222.
J’ai une âme, donc je suis. J’ai une âme dans un corps de femme, donc j’existe. J’aime cette aventure qui a commencé pour moi sur le chemin de l’éternité par ma conception. Mon premier cri de vie, je le dois à une femme, ma mère Marija, dont je n’étais que la huitième enfant. Je lui suis reconnaissante de n’avoir pas laissé couper le cordon ombilical avant le temps. J’ai grandi dans l’amour qui s’exprimait beaucoup plus par des actes que par des paroles. Ma féminité, au regard du monde et de mon milieu de vie, a passé par plusieurs phases de mutations. Jeune fille aux études, je n’étais pas attirée par l’idylle du foyer. Jeune mère, je me suis engagée à demeurer à la maison et je m’y trouvais bien tout en gardant la fenêtre grande ouverte sur le monde. La vague féministe ne me préoccupait pas au point de me sentir obligée de prendre part aux manifestations sur la place publique. Je ne me suis jamais considérée inférieure aux hommes. J’ai compris, depuis mon jeune âge, que chacun de nous, homme ou femme, d’une façon ou d’une autre, doit lutter pour son espace vital et ses convictions. J’ai cru à la fierté de la femme, à son potentiel immense, à ses talents multiples, à sa capacité d’amour pour la personne humaine.
Aujourd’hui, à la recherche de son identité, la femme vit souvent au masculin. Pour s’affirmer sur le marché du travail, elle mène une lutte gigantesque afin de démontrer qu’elle est égale à l’homme. Dans la crise actuelle de l’humanité, le problème de la femme requiert une attention vitale et primordiale : c’est une question d’être ou de ne pas être. Femme-fille, femme-épouse, femme-mère, femme-célibataire, elle cherche toujours sa vraie place. Femme, que reste-t-il de ta liberté, de ton identité, de ton corps en ce début de xxie [p. 200]siècle qui te promettait des solutions miracles ? Il y a eu des périodes dans l’histoire de l’humanité où la dignité de la femme a été mieux respectée. Il y a eu des périodes où la vie cachée dans le sein maternel était sacrée tant pour la femme que pour l’homme. L’être humain sans défense, dans cette phase de son développement, n’a jamais été à ce point menacé.
À ma première visite à Medjugorje, j’ai fait une véritable découverte. J’ai ressenti partout la compagnie chaleureuse d’un être rempli d’amour et de tendresse, une présence invisible de celle dont tout le monde parlait au village. C’était Marie, mère de Jésus, en visite chez nous. J’étais heureuse de cette rencontre et je me suis exclamée comme sa cousine Élizabeth : « Bénie es-tu entre les femmes ! » (Lc 1, 42) Plus que jamais, je me suis sentie bien dans ma condition de femme. Petit à petit, Marie m’a aidée à découvrir dans son message l’importance et la beauté de la prière, l’amitié de son Fils, l’amour du Père, la générosité de l’Esprit-Saint, l’acceptation de la Croix et l’Évangile au quotidien. J’ai commencé à mieux comprendre son « oui » inconditionnel. C’est la femme totale, mère du Dieu éternel, femme qui engendre la vie et l’offre pour le salut du monde. C’est pourquoi Jésus, mourant sur la Croix, va nous confier à elle : « Femme, voici ton fils. » Femme, voici mes frères et mes sœurs; ils sont à toi. Prends soin d’eux, conduis-les au Père. C’est le sort de l’humanité dans le « oui » d’une femme. De combien de « non » avons-nous mutilé le monde avant et après son Magnificat ?
Si cette génération nous tient à cœur, il nous faut trouver la femme libre, et lui donner la place qui lui revient, celle de tenir l’humanité en équilibre, de réchauffer de son cœur de femme ce monde glacé, et de s’occuper de la personne humaine en train de périr. Ave Maria, pleine de grâce ! Remplis-nous de ta ferveur, de ton amour pour que nous puissions, à ton exemple, réaliser notre mission propre en répétant ton « oui ». « Oui » pour un monde meilleur, « oui » pour une terre féconde de paix, d’amour et d’espérance. « oui » pour Dieu et pour chaque être humain.
Montréal, mai 1989