Medjugorje : le témoignage des prêtres
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Témoignages de prêtres canadiens francophones venant de 13 diocèses à travers le Canada (deux en Saskatchewan, un au Nouveau-Brunswick et dix au Québec). Ils ont séjourné à Medjugorje du 17 au 26 janvier 1991 et les témoignages ont été recueillis dans la soirée du 23 janvier à la pension de Grgo Vasilj, père de Jelena, l’une des deux jeunes filles ayant des locutions intérieures.
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Quand je prends le micro, il m’arrive de parler longtemps, alors je vais m’installer confortablement… [rires]
C’est la première fois que je viens en Europe. Parmi les prêtres, je suis l’un des plus jeunes, avec juste deux ans d’ordination. Mon conseiller spirituel est venu à Medjugorje il y a deux ans et il m’a parlé de son voyage.
Cette année a été une année de grand chambardement : je suis sorti d’une communauté religieuse, la fraternité sacerdotale, après avoir passé une année en Colombie et ensuite je me suis incardiné dans un diocèse. Évidemment, quand on est séculier, on a plus de liberté. Tout cela pour expliquer que l’on peut dire que je suis venu ici de façon un peu précipitée.
Mais l’essentiel de mon témoignage, le voici : là où je vivais auparavant, il était obligatoire de dire le chapelet tous les jours et parfois, au sein de la communauté, on le disait ensemble. Lorsque je me suis retrouvé séculier, j’ai essayé de vivre cette dévotion, mais je dois dire que l’activité pastorale est assez prenante. L’office des Heures (le bréviaire) se dit souvent à la course, avant le déjeuner et même après les temps de réunions autour de 11-l2 heures. J’avais des scrupules de ne pas trouver le temps pour le chapelet, alors je me disais : « Pense à l’office du milieu du jour, aux vêpres, aux complies. Et ensuite, tu pensera au chapelet. » Conclusion : Bonne Sainte Vierge, je n’y arrivais jamais !
La Vierge a toujours fait partie de ma vie. J’ai néanmoins constaté que je n’ai pas toujours été reconnaissant envers elle. J’ai parlé de la Vierge à certaines occasions, mais de façon un peu gênée, surtout dans mes homélies. On m’avait appris que prier le chapelet, dire son Rosaire, c’était méditer les mystères de la vie de notre Seigneur Jésus Christ. Mais cette prière me paraissait répétitive, un peu comme chez les musulmans avec les redites.
Tout au long des six jours passés ici, j’ai appris que Marie, à travers la prière du Rosaire, nous offre une formidable préparation à l’Eucharistie : elle sait si bien nous conduire à son divin fils ! Marie ne prononce qu’une parole et tout en Jésus s’accomplit.
J’ai admiré la façon de dire le Rosaire, surtout avec le père Slavko qui méditait et actualisait les Mystères de Jésus à travers la vie à Medjugorje. Et c’est là qu’est né en moi le goût de prier le Rosaire. Je me suis même surpris à penser qu’il fallait que j’organise mon temps : me lever à 6 heures au lieu de 6h45 et m’offrir la possibilité de dire le premier chapelet. Je suis habituellement libre entre l3 heures et 13h45, voilà pour mon deuxième. Et si, avant la messe de 19 heures, j’allais plus tôt au confessionnal, c’est-à-dire à 18 heures, et bien dès 18h45 je serais libre et, avec les paroissiens déjà arrivés, je pourrais réciter le troisième chapelet et faire aussi la méditation : ce serait une belle préparation à l’Eucharistie !
Là où je suis vicaire, j’ai moins de disponibilité. Toutefois, comme curé à l’autre paroisse, j’ai plus de latitude. Je vais proposer aux gens de commencer, avant la messe du dimanche, par le petit chapelet de sept Notre Père, sept Je Vous Salue Marie, sept Gloire au Père. Il y a deux messes, une en anglais et une en français. Je vais préparer les fidèles en leur disant : « Dimanche prochain, 15 minutes avant la messe, nous ferons une prière pour mieux nous préparer à l’Eucharistie. » En effet, combien de fois venons-nous à l’Eucharistie pour, en fin de compte, ne pas y être présent ?
Après le témoignage de Jelena et de Marija, je me suis justement aperçu que le Rosaire devenait une prière du cœur ; là est le secret, ce n’est plus une répétition, mais bien un chemin pour intérioriser la présence de Dieu. J’espère que ma conversion me permettra de rester fidèle pour toujours.
Comme prêtre, j’ai beau vouloir prendre des moments de méditation et d’oraison, je me laisse toujours déranger. J’essaie de garder une certaine fréquence horaire pour dire le Bréviaire en me réservant, par exemple, une heure le matin et je demande alors à la secrétaire de ne pas me déranger. Cependant, le curé absent, je réponds aux sollicitations. Lorsque je n’ai pas le temps de prier, je trouve des compensations, je me justifie en me disant qu’accomplir mon ministère, c’est aussi une vie de prière. Quand j’assure le service de prédication aux messes, (quatre célébrations dominicales), il est des périodes d’assèchement énorme. Je n’ai plus de connexion avec le cœur, alors que je devrais rester profondément immergé dans ma relation avec Dieu.
Maintenant, je me dis : « C’est cette relation avec Dieu qui fait ma force dans la vie pastorale et non pas les multiples planifications à faire, encore moins les nombreux laïcs à mobiliser. C’est vraiment la prière du cœur qu’il me faut. »
J’ai le souvenir d’une expérience vécue lorsque j’étais en pastorale jeunesse. Avec les jeunes, nous avions fondé un café chrétien. À un moment donné, il y a eu de la bisbille. J’ai réagi tout en les encourageant par ces mots : « Écoutez les amis ! Il faut prier ; c’est seulement dans la prière qu’on retrouvera l’unité ». Un jeune m’a dit alors : « C’est ce qu’on attend de toi, que tu sois un homme de Dieu, celui qui nous offre ici même sa présence divine et pas autre chose. » Ce jeune m’a replongé dans le sens plénier du sacerdoce ministériel.
Ce sont bien souvent les laïcs qui nous font découvrir la signification de la vie pratique du prêtre. Nos fidèles nous rappellent qui nous sommes et ce qu’ils attendent de nous.